mercredi 1 février 2012

Rose+Croix II

C'est incontestablement le premier Salon de 1892, qui sera le plus important, par le nombre et la qualité des artistes qui participent, et par le nombre de visiteurs, plus de 20 000. C'est la galerie Durand-Ruel qui accueille cette exposition. Paul Durand-Ruel (1831-1922) est, sans doute, le plus grand marchand de tableaux de l'époque.

Photographie de Paul Durand-Ruel 
dans sa galerie (vers 1900).


Il gagnera une grande fortune en ayant défendu les peintres de l'Ecole de Barbizon et surtout les Impressionistes dont il sera le plus important négociant.

Pierre-Auguste Renoir. Portrait de 
Paul Durand-Ruel, 1910.


C'est le peintre suisse Carlos Schwabe (1866-1926), qui conçoit l'affiche de l'exposition.


Carlos Schwabe (1866-1926) est un des peintres les plus importants du Symbolisme quoiqu'il soit un peu négligé aujourd'hui. De nationalité suisse mais né en Allemagne, il s'installera définitivement en France en 1884. Visionnaire mystique et solitaire, il sera un ami fidèle de Joséphin Péladan. Après l'exposition de la Rose+Croix esthétique, il exposera à la Sécession munichoise l'année suivante. Il a été un dreyfusard de la première heure et le meilleur ami du compositeur belge Guillaume Lekeu (1870-1894), mort de la typhoïde prématurément. Il est surtout connu pour ses illustrations des Fleurs du Mal.

Carlos Schwabe. La mort et le fossoyeur.


Carlos Schwabe. Illustrations pour Les Fleurs du Mal.









Carlos Schwabe. L'Ange d'espérance.


Carlos Schwabe. Le Faune.


Carlos Schwabe. La chevelure de Méduse.


Carlos Schwabe. La Vague.


Carlos Schwabe. Le Silence de la mer.


Photographie de Guillaume Lekeu en 1886.


Adagio pour quatuor d'orchestre (1891). 
Une de ses œuvres majeures, 
qui annonce l'Adagietto de la 
5ème Symphonie de Gustave Malher. 
Un climat très proche du symbolisme.


Carlos Schwabe était aussi un ami de Jules Bois (1868-1943). Encore une personnalité extraordinaire que ce Jules Bois. Poète, romancier, journaliste, il est un des meilleurs amis de Joris Karl Huysmans. Il se bat en duel avec Papus et Stanislas de Guaita et devient secrétaire de Catulle Mendes (1841-1909), célébrissime auteur de l'époque, totalement tombé dans l'oubli aujourd'hui.

Photographie de Jules Bois en compagnie de Joris Karl Huysmans (à droite). Date inconnue.


En 1889, il rejoint l'Ordre de l'Etoile fondée par Albert Journet. Il se lie avec Péladan et Antoine de la Rochefoucauld. en 1894, il publie La Porte Héroïque du Ciel, Drame Esotérique, accompagné de 2 dessins de La Rochefoucauld et pour lequel Erik Satie écrit un Prélude.

Erik Satie. Prélude de La Porte Héroïque du Ciel, 1894.


Photographie de Jules Bois, date inconnue.


Il se passionne ensuite pour la théosophie et pour les religions orientales. Il rencontre Swami Vivekananda (1863-1902) et lui rend visite en Inde. En 1908, il écrit une préface pour Le Diable en Cellule de Léonce de Larmandie. Il se convertit au catholicisme puis entame une carrière de diplomate et souvent d'agent de renseignements, notamment pendant la Guerre de 14-18. Il meurt à New-York en 1943.
Erik Satie (1866-1925) est le véritable maître de chapelle de l'Ordre Rose+Croix esthétique. Pour l'exposition de 1892, il compose 3 Sonneries des Rose+Croix, qui sont jouées en alternance avec le Prélude de Parsifal de Wagner, sans doute dans une réduction pour piano.

Erik Satie. Trois Sonneries des Rose+Croix, 1892. 
Nicolas Horvath, piano.



Richard Wagner. Prélude de Parsifal, 1882. 
Orchestre philharmonique de Vienne, dirigé par Georg Solti.




Surnommé Esoterik Satie par l'humoriste Alphonse Allais, il a été renvoyé deux fois du conservatoire de Paris, pour inaptitude musicale. Entre 1889, date des ses Ogives et 1895, il traverse une période mystico-ésotérique. Sa musique est riche en accords complexes, qu'il abandonnera progressivement au bénéfice d'une musique plus directe, influencée par le music-hall, le cirque et l'esthétique Dada.
Durant sa période mystique, il fut brièvement, l'amant de Suzanne Valadon (1865-1938).


Deux photographies d'Erik Satie vers 1890.



Marcelin Desboutin. Portrait d'Erik Satie, date inconnue.


Suzanne Valadon. Portrait d'Erik Satie, 1893.



L'exposition de 1892, accueille des très grandes pointures de l'art de cette période, notamment Fernand Khnopff et Ferdinand Hodler.
Fernand Khnopff (1858-1921) est un peintre et sculpteur belge, dont l'œuvre est en train d'être redécouverte. Ses œuvres teintées de mystère sont souvent difficiles à comprendre. Il a souvent illustré les œuvres de Péladan. La précision quasi-maniaque de sa peinture et son onirisme, en font un prédécesseur direct de Magritte. Ses œuvres, exposées à la Sécession de Vienne en 1898, ont profondément influencées Gustav Klimt.


Photographie de Fernand Khnopff, vers 1900.




Fernand Khnopff. Memories. Pastel sur papier, 1889. L'artiste utilise plusieurs photos de sa 
sœur Marguerite, jouant au tennis
et crée un climat d'étrangeté.




Fernand Khnopff. I lock my door upon myself
Pastel sur papier, 1891.




Fernand Khnopff. Portrait de Marguerite. Huile sur toile.




Fernand Khnopff. Le Sphynx ou Des Caresses
Huile sur toile, 1898.




Fernand Khnopff. Illustration pour 
La Décadence Latine du Sar Péladan.




Fernand Khnopff. Future ou une Femme anglaise
Marbre et laiton sur cuivre.




Fernand Khnopff. Brutalité. Huile sur toile.




Fernand Khnopff. Méduse endormie. Pastel sur papier.




Fernand Khnopff. Masque. Plâtre coloré, 1897.




Ferdinand Hodler (1853-1918) est le plus grand peintre suisse de cette période. Il s'installe à Genève en 1872 et y passera toute sa vie. Admirateur de Gustave Courbet et Pierre Puvis de Chavannes, son grand tableau La Nuit (1891) fait scandale à Genève et doit être décroché. Il est très admiré à Paris. les caractéristiques de son œuvre son présentes dès le début : la symétrie et la monumentalité. Ses personnages puissants et sculpturaux se détachent sur des fonds clairs comme sur une fresque. On ne peut pas ne pas penser à Piero Della Francesca.
Hodler peindra aussi de nombreux paysage de la région de Genève.


Deux photographies de Ferdinand Hodler prise vers 1915.





Ferdinand Hodler. Autoportrait. Huile sur toile, 1891.




Ferdinand Hodler. La Nuit. Huile sur toile, 1891.



Ferdinand Hodler. Communion avec l'infini
Huile sur toile, 1892. 


Ferdinand Hodler. Le Jour I. Huile sur toile, 1899-1900.


Ferdinand Hodler. La Vérité II. Huile sur toile, 1903.


Sans doute moins prestigieux que ces deux artistes, Alexandre Séon (1855-1917) n'en reste pas moins une figure marquante du symbolisme. Elève et assistant de Puvis de Chavannes, il gardera de son maître la monumentalité des figures et une certaine mélancolie. Fidèle parmi les fidèles de la Rose+Croix, il n'aura que peu de commandes officielles. Il illustrera de nombreux ouvrages de Péladan.

Alexandre Séon. Les lamentations d'Orphée
Huile sur toile.


Alexandre Séon. Le récit. Huile sur toile, vers 1898.


Alexandre Séon. Etude d'homme. Dessin sur papier ocre.

Collection personnelle

Alexandre Séon. La Pensée. Huile sur toile.


Alexandre Séon. La pensée. Huile sur toile.


Alexandre Séon. La chimère désespérée. Huile sur toile.


Alexandre Séon. Le retour. Huile sur toile.


Alexandre Séon. Portrait du poète 
Emmanuel Signoret (1872-1900). 
Dessin à la plume.


Alexandre Séon. Narcisse. Pastel sur papier.


Alexandre Séon. La sirène. Huile sur toile.


Parmi les artistes invités lors de cette exposition, il y a le sculpteur Antoine Bourdelle (1861-1929) qui n'est pas encore célèbre. Il a été élève à l'école des Beaux-Arts. En 1893, il devient l'assistant de Rodin, puis, à partir de 1908, il devient indépendant et reçoit de nombreuses commandes pour des monuments. Son œuvre la plus célèbre reste Herakles archer (1909). Par la simplification des formes et la monumentalité, il annonce la sculpture moderne, notamment Ossip Zadkine.

Photographie de Bourdelle, vers 1890.


Photographie de Bourdelle en 1925.


Antoine Bourdelle. La première victoire 
d'Hannibal, 1885.


Antoine Bourdelle. Portrait de 
l'acteur Coquelin Cadet, 1891.


Antoine Bourdelle. Portrait de 
l'Acteur Coquelin aîné, 1893.


Antoine Bourdelle. Deux bustes de Beethoven.



Antoine Bourdelle. Le jour et la nuit, avant 1903.


Antoine Bourdelle. Herakles archer, 1909.


Antoine Bourdelle. Portrait de Jeanne Prinet, 1910.


Tout au long de sa carrière, Bourdelle a dessiné ou peint.

Antoine Bourdelle. Autoportait.


Antoine Bourdelle. Portrait de jeune fille.


Antoine Bourdelle. Fillette à la rose.



Un artiste symboliste, un peu injustement oublié et qui participa aux exposition de la Rose+Croix, est Armand Point (1861-1932). 
Il est en Algérie. Sa famille s'installe à Paris en 1870 mais retourne en Algérie en 1878. Le jeune homme fait beaucoup d'excursion et devient un peintre orientaliste. A partir de 1889, il passe de plus en plus de temps en métropole et se fixe en Paris en 1891. L'année de l'exposition, il achète à Marlotte, une propriété qu'il transforme en colonie d'artistes à la manière de William Morris, le logis de la Haute-Claire. Sa peinture est très influencée par la Renaissance italienne et par le peintre préraphaélite Edward Burnes-Jones (1833-1898).


Armand Point. Autoportrait, 1882.



Armand Point. Biblis transformée en source
Huile sur toile.


Armand Point. Isolde. Sanguine sur papier ocre.


Armand Point. L'Annonciation. Huile sur panneau.


Armand Point. La légende Dorée
Estampe éditée pour l'Estampe Moderne, 1898.


Armand Point. La sirène. Huile sur toile.


Armand Point. Le bain. Huile sur toile.


Armand Point. Le Christ et Marie Madeleine
Mine d'argent sur papier bleu.


Armand Point. La princesse à la licorne
Détrempe sur panneau.


Armand Point. Princesse de légende
Détrempe sur panneau. 
Le cadre a été dessiné par Armand Point.


Armand Point. Affiche pour la 5ème exposition de la Rose+Croix esthétique, 1896.


Tout comme William Morris, Armand Point s'intéresse à toute les techniques et notamment à l'émaillage, dont il va devenir un virtuose.

Armand Point. La princesse. Panneau émaillé.


Armand Point. Le Coffret au paon
Cuivre doré et émaillé.




A la fin de sa vie, il va de plus en plus souvent en Italie pour sa santé. Il meurt à Naples en 1932.





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