Léon Spilliaert est de ces artistes à qui la jeunesse va bien. Dès que l'âge mur arrive ils sont condamnés à se répéter et leur œuvre à s'affadir. Ce fût le cas du seul artiste dont Spilliaert reconnaissait l'influence, James Ensor (1860-1949), qui mourût artistiquement en 1900 et ce fût aussi le cas de Spilliaert dont l'art après la Première Guerre Mondiale devient celui d'un paysagiste du dimanche.
Leon Spilliaert est né à Ostende en 1881. Fils d'un parfumeur, il suit quelques cours de peinture à l'Académie de Bruges mais il sera essentiellement autodidacte. Taciturne, il ne sort que la nuit et parcourt inlassablement les rues d'Ostende qui est, sous le règne de Léopold II, la reine des stations balnéaires belges.
Un autre habitant d'Ostende, au faîte de la célébrité durant la Belle Epoque, James Ensor, se plaint de ne jamais pouvoir sortir de chez lui sans tomber sur Spilliaert.
Plus qu'une formation artistique, Spilliaert se fait une formation littéraire. Lecteur impénitent, il s'intéresse aussi bien à Nietszche qu'à Edgar Poe qui est un de ses auteurs favoris. C'est par l'éditeur bruxellois Edmond Deman, qu'il connaîtra les œuvres de Fernand Knopff et de Théo van Rysselberghe. Il sera aussi un proche de Verhaeren.
Hormis un séjour à Paris et son installation à Bruxelles, Spilliaert voyagera très peu et tout son univers est concentrée sur deux sujets principaux, lui-même et la Mer du Nord.
Pendant toute son activité picturale, Spilliaert n'utilisera jamais l'huile et la toile. Ses outils sont l'encre, le crayon de couleur ou le pastel, parfois l'aquarelle.
Symboliste de la dernière génération — sa première œuvre date de 1899 — il touche parfois au surréalisme et ses mise en page surprenantes, si elles évoquent parfois l'art japonais, rappellent aussi souvent, le cinéma expressionniste et ses noirs et blancs inquiétants comme dans son fameux Vertige (1908).
La Poursuite, 1910.
Femme sur la digue, 1909.
Printemps, 1911.
Clair de lune et lumières, 1909.
Ostende, digue. Effets de lumières, 1908.
Femme en pied, 1902.
La Traversée, 1913.
Deux photographies tirées de Nosferatu
de F. W. Murnau, 1922.
Murnau. Nosferatu, film intégral, 1922.
Leon Spilliaert est né à Ostende en 1881. Fils d'un parfumeur, il suit quelques cours de peinture à l'Académie de Bruges mais il sera essentiellement autodidacte. Taciturne, il ne sort que la nuit et parcourt inlassablement les rues d'Ostende qui est, sous le règne de Léopold II, la reine des stations balnéaires belges.
Une vue de la digue d'Ostende vers 1900.
Plus qu'une formation artistique, Spilliaert se fait une formation littéraire. Lecteur impénitent, il s'intéresse aussi bien à Nietszche qu'à Edgar Poe qui est un de ses auteurs favoris. C'est par l'éditeur bruxellois Edmond Deman, qu'il connaîtra les œuvres de Fernand Knopff et de Théo van Rysselberghe. Il sera aussi un proche de Verhaeren.
Hormis un séjour à Paris et son installation à Bruxelles, Spilliaert voyagera très peu et tout son univers est concentrée sur deux sujets principaux, lui-même et la Mer du Nord.
Pendant toute son activité picturale, Spilliaert n'utilisera jamais l'huile et la toile. Ses outils sont l'encre, le crayon de couleur ou le pastel, parfois l'aquarelle.
Symboliste de la dernière génération — sa première œuvre date de 1899 — il touche parfois au surréalisme et ses mise en page surprenantes, si elles évoquent parfois l'art japonais, rappellent aussi souvent, le cinéma expressionniste et ses noirs et blancs inquiétants comme dans son fameux Vertige (1908).
Chez Spilliaert la mer a toujours quelques chose d'effrayant quelle soit étale et noire le long des plages infinies de la Flandre comme dans Digue et plage (1907), La Courbe de l'Esplanade (1908) ou La Digue (1909) ou qu'elle soit agitée et comme animée d'une vie serpentine et maligne comme dans deux œuvres de 1910, La Baigneuse et Les Pieux, cette dernière touchant au fantastique.
La Digue, 1909.
La Baigneuse, 1910.
Les Pieux, 1910.
L'acteur principal dans l'art de Spilliaert avant la Première Guerre Mondiale, c'est la nuit, même lorsque la scène se passe de jour comme dans Printemps. La vie humaine est soit absente, soit réduite à des silhouettes vacillantes absorbées dans le brouillard ou prostrées dans le vent du nord, scènes à la limite de l'abstraction comme dans Clair de lune et lumières (1909). Un des peintres qui a le plus inspiré Spilliaert est, sans aucun doute, William Degouve de Nuncques (1867-1935) qui partageait avec lui une passion pour les ambiances nocturnes.
Léon Spilliaert. La Nuit, 1908.William Degouve de Nuncques. Nocturne au Parc
Royal de Bruxelles. Pastel, 1897.
La Poursuite, 1910.
Femme sur la digue, 1909.
Printemps, 1911.
Clair de lune et lumières, 1909.
Ostende, digue. Effets de lumières, 1908.
L'impression de tristesse et de désolation qu'on ressent lorsqu'on voit un tableau de Spilliaert — c'est un de mes peintres favoris — a très bien été résumé par une phrase du peintre lui-même : Ma vie s'est passée seul et triste, avec un immense froid autour de moi. J'ai toujours eu peur.
A part lui-même, Spilliaert ne représente que des femmes. Enfin... plutôt des impressions féminines, le plus souvent des spectres décharnées plus proche de Madeline Usher (Poe, La chute de la Maison Usher dont Debussy essayait de faire un opéra à la même période) que des solides et plantureuses flamandes de Rubens.
Edvard Munch. Soirée sur l'avenue Karl-Johann,
Huile sur toile, 1892.
Léon Spilliaert. La Buveuse d'absinthe, 1907.
A part lui-même, Spilliaert ne représente que des femmes. Enfin... plutôt des impressions féminines, le plus souvent des spectres décharnées plus proche de Madeline Usher (Poe, La chute de la Maison Usher dont Debussy essayait de faire un opéra à la même période) que des solides et plantureuses flamandes de Rubens.
L'Attente, 1902.
Femme nue tenant une coupe, 1910.
Femme avec un chapeau, 1907.
Lorsque Spilliaert se lance à faire un portrait, il nous propose un masque. En celà il est un digne héritier de Ensor mais aussi un homme ancré dans le Symbolisme fin de siècle. Rappelons Histoire de Masques (1900) de Jean Lorrain (1855-1906), que le critique Gustave Coquiot (1865-1926) dans sa préface, rapproche, du reste, de Ensor, mais aussi Le Masque (1889) de Maupassant et, bien entendu, Le Masque de la Mort Rouge de Poe.
D'autres influences, plus picturales, se font sentir. Dans La Buveuse d'absinthe, le personnage aux yeux exorbitées sorte de lémure blafard vient en droite ligne de Munch.
Edvard Munch. Soirée sur l'avenue Karl-Johann,
Huile sur toile, 1892.
Léon Spilliaert. La Buveuse d'absinthe, 1907.
Parfois le masque se fait caricature, mais caricature grinçante, inquiétante. La femme est déformée presque difforme. Dans La Traversée, on ne voit que la bouche immense, presque vampirique de la femme appuyée contre le bastingage. Chaque fois que je vois cette œuvre je pense à l'acteur Max Schreck (1879-1936), l'incarnation du Nosferatu (Nosferatu, eine Symphonie des Grauens, 1922) de Friedrich Wilhelm Murnau, dans la scène du navire.
Femme en pied, 1902.
La Traversée, 1913.
Deux photographies tirées de Nosferatu
de F. W. Murnau, 1922.
Murnau. Nosferatu, film intégral, 1922.
On a voulu rapprocher certaines œuvres de Spilliaert de la Pitura Metafisica de Giorgio de Chirico (1888-1978) sous prétexte qu'on y trouvait la même architecture vide et avec quelques effets lumineux. En ce qui me concerne, je pense que les deux peintres ont une démarche radicalement différente. Chirico est avant tout un méditerranéen pétri de culture classique et chez qui l'humour est constamment sous-jacent. On chercherait vainement la moindre trace d'humour et la moindre référence à l'art classique chez Spilliaert. La ressemblance qu'on peut voir entre La Mélancolie du départ de Chirico (1914) et La Galerie Royale d'Ostende de Spilliaert (1908) est simplement de l'ordre de la coïncidence.
Giorgio de Chirico. Gare Montparnasse, la Mélancolie
du départ. Huile sur toile, 1914.
Léon Spilliaert. La Galerie Royale d'Ostende, 1908.
En revanche, il est évident que Spilliaert songe à Fernand Khnopff lorsqu'il transforme la galerie royale en immense forêt de fûts et qu'il allonge à l'infini la perspective.
Fernand Khnopff. La Forêt de Fosset, sous les arbres.
Huile sur toile, 1894.
Arrivons en maintenant à la partie de l'œuvre de Spilliaert qui est sans doute la plus étonnante : ses autoportraits. Entre 1903 et 1908, il exécute des dizaines d'autoportraits. Jamais sans doute, depuis Rembrandt, un peintre ne s'était autant représenté. Contrairement à Rembrandt qui le fait sur toute une vie et dans des costumes parfois extravagants, Spilliaert se représente sur un temps très court et toujours dans le même tenue de ville qui le fait ressembler à un ordonnateur de pompes funèbres. Certains de ses autoportraits sont d'une précision maniaque presque appliquée alors que d'autres se noient dans une lumière glauque d'aquarium, lui-même se transformant en une sorte de batracien monstrueux. Certains de ses autoportraits ne sont pas sans évoquer ceux de Francis Bacon, tant la dématérialisation de la figure humaine va loin.
1903.
1907.
1908.
Après la Guerre de 14-18 son art se transforme et s'affadit. Alors qu'il écrivait à Ensor qu'il ne se marierait jamais, il se marie. Peu connu en belgique, il est apprécié en France. Sa palette s'éclaire et ses paysages d'Ostende perdent beaucoup d'intérêt.
Paysage de mer avec des voiles blanches, 1922.
En même temps, lors d'une interview en 1926, il fait preuve d'une autosatisfaction assez surprenante : Je ne connais guère les peintres nouveaux. J'entends ignorer mes influences. J'adore les masques, je m'alimente à la mer, Paris m'est totalement inconnu. L'influence française est partout dans la peinture de second ordre. Notre peinture est la meilleure puisque j'en suis.
Il passera la fin de sa carrière a représenter des arbres d'une façon presque obsessionnelle. Il meurt d'une crise cardiaque à Bruxelles en 1946.
Tronc et branches au Printemps, 1930.
Merci pour cet article très détaillé à propos d'un peintre réellement étonnant.
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